Forme chorégraphique/Performance

Supernovae

Les Machines désirantes

En résidence du 20 janvier 2014 au 26 janvier 2014
En résidence du 10 mars 2014 au 16 mars 2014
En résidence du 13 octobre 2014 au 17 octobre 2014
En résidence du 15 juillet 2015 au 17 juillet 2015

Le titre, c'est pris chez Gilles Deleuze, qui oppose dans l'anti-Oedipe les machines sociales et les machines désirantes. Ce livre, c'est contre l'image freudienne de l'Oedipe, qui nous apprend la résignation et qui est le mécanisme qui aide les machines sociales à réprimer les machines désirantes. C'est un manifeste pas dénué d'humour contre une machine de codage des flux de désir qui rabattent tout sur le triangle papa-maman et moi. Dans ce livre, la figure du schizophrène est celle du révolutionnaire. C’est celui qui dit : « Non, je ne suis pas des vôtres, je suis le dehors et le déterritorialisé, je suis de race inférieure de toute éternité,… je suis une bête, un nègre ». Le schizophrène c’est celui qui « a porté ses flux jusque dans le désert ».Le schizophrène fait fuir le système par tous les côtés. Il ne délire pas sur papa-maman, mais il délire sur la guerre, sur les races, sur le monde.

MATERIAU 1

Et puis il y a Marguerite Duras, qui dit : « Je disais que l'écriture courante que je cherchais depuis si longtemps, je l'ai atteinte. Maintenant j'en suis sûre. Et que par écriture courante, je dirais écriture presque distraite, qui court, qui est plus pressée d'attraper des choses que de les dire, voyez-vous. Je parle de la crête des mots, c'est une écriture qui courrait sur la crête, pour aller vite, pour ne pas perdre. Parce que quand on écrit, c'est le drame, on oublie tout tout de suite et c'est affreux quelquefois ». 

MATERIAU 2

Alors, je pars de ces mots qui me racontent des choses pour envisager une écriture de plateau, pas intellectuelle, mais un truc organique et vivant ( et drôle aussi ), une texture onirique inouïe, une alchimie particulière.

Un travail qui mettrait en marche ces machines désirantes, ces machines orphelines et célibataires. 

Et cela, juste avant l'évènement dramatique, dans la recherche du tout petit, du minuscule, une dramaturgie de la banalité. C'est le lieu que je cherche, le « avant » l'histoire qui flèche le parcours. J'emprunte à mon expérience de comédienne un travail avec une danseuse de la chorégraphe Odile Duboc, et le comédien Laurent Poitreneau, avec lesquels j'ai travaillé ce rapport chorégraphique infiniment petit et que je souhaiterais explorer davantage. L'avant-geste, l'esquisse, et malgré tout le poids du corps, la respiration. Et notamment les « Fernands », petites chorégraphies du quotidien, du presque rien (décomposer l'ouverture d'un journal pour repérer les transferts exacts de poids, puis le refaire à vitesse normale, tout naturellement, tous en même temps, au milieu des autres...).

MATERIAU 3

Et puis il y a les photos d'Helen Levitt, que j'aime beaucoup et qui me guident. C'est une photographe du seuil, qui n'importune pas ses modèles. Pas de message social, pas d'état des lieux, mais une empathie certaine. Une vision d'en bas, elle traque les dessous candides. Des poules devant un parterre de chaises sous plastique. Les croqueurs de pastèques. Les ladies en bigoudis. Le surpeuplement des cabines téléphoniques. L'humanité. Fragile. 

Emilie Beauvais 

Zoé Bennett