
Collectif La Viande
Médéa fiam Médéa nunc sum
Une femme, interprétée par une actrice de facture tragique, rôle unique, en devenir d’être Médée.
L’Autre, défiguré par l’esprit de Médée, est un bouffon ou un clown. Il est à la fois la nourrice, Créon et Jason. Pour le spectateur normal, son discours et ses actes se réfèrent à la normalité. Or la normalité dans l’esprit de Médée n’a pas de sexe, pas de personnalité, pas de contour fixe. L’Autre, parce qu’il est dépersonnalisé, devenu objet dont les noms, les rôles, les discours, sont interchangeables et varient au fil de la pièce, n’aura aucune incidence sur la destiné de notre Médée en devenir.
Le choeur oeuvre avec l’actrice car il dessine les contours de Médée en devenir. En coryphée, en capitaine, il porte le récit de l’actrice, sa souffrance, à la connaissance du monde. Mélange d’hallucinations auditives et de bribes mémorielles sonores.
L’homme orchestre électronique joue une seule et même pièce musicale du début jusqu’à la fin, accompagnant et confortant l’actrice - la femme - Médée - dans son voyage psychotique.

La nourrice, motivée par sa piété, son amour filial et son désir d’apaiser Médée, place son argumentaire dans une logique d’empathie (choisir la vie en exil plutôt que subir les foudres du roi). Seule la réelle compassion la tient aux côtés de Médée.
Jason, quant à lui, abdique après avoir éprouvé une grande admiration pour elle et face à la toute puissance de son délire, ne désire plus la suivre. Il intercède auprès du roi pour demander la grâce de Médée. Il supplie Médée d’être raisonnable - «pense aux enfants» - et de choisir l’exil plutôt que la mort.
Le roi Créon, témoigne à la fois d’autorité et de bonté. Mandaté par son peuple, il se doit d’être juste, d’assurer la paix et la cohésion entre les hommes, accepter Jason, chasser Médée. «Débarrasse le royaume - Emporte les herbes de mort - Libère mes sujets de la peur - Va t’installer en d’autres lieux - Va inquiéter ailleurs d’autres dieux.»
Une pièce musicale
Le texte est une réécriture de Médée de Sénèque en monologue avec apartés burlesques (interventions du clown). Celui-ci, interprété de manière lyrique par l’actrice de facture tragique est joué en duo avec l’homme Orchestre. La voix et le son voyagent sans discontinuité jusqu’au point de non retour.Qu’il y ait diantre de la couleur et fichtre de l’humour
Une esthétique naïve
Avec une scénographie coloré et naïve (toile peinte, machinerie à vue, bateau sur escabeaux...) nous cherchons à laisser parler les images. C’est un travail sur la texture sonore et visuelle qui tente d’approcher au plus près ce que peut être l’univers irréel et onirique d’une femme qui traverse un état délirant (hallucinaUne
Anachronismes et collage
Pour éviter la redondance avec un thème déjà cruel et pathétique, c’est la vivacité d’esprit et la dérision de notre Médée maniaque et mégalomane qui seront mis en valeur. Pour cela, nous nous employons a créer un univers qui lui appartient, et qui ne relève d’aucune période historique donnée ni d’aucune hétérogénéité stylistique. S’y côtoient la figure du marin beau et viril, stéréotype des années 50, d’un bouffon ambivalent et hermaphrodite, et d’une authentique tragédienne.
Ce travail est un questionnement sur notre rapport à la folie, notre réaction aux actions déraisonnables qu’elle entraîne et notre difficulté à entrer en communication avec les «fous», à les aider, voire à simplement les tolérer. Que ce soit la nourrice, Jason ou Créon les réactions divergent mais se ressemblent.
Mise en Scène │ Marlène Deschamps
L'actrice │Julie Tarnat
Le Bouffon│Guy-Loup Boisneau
L'homme-orchestre│Julien Barathay
Scènographie de plateau │ Stéphanie Delpouve
Régisseur général │ Grégoire Durrande